Bernard Tapie est à la barre. Mardi 12 mars, pour le deuxième jour de son procès à Paris, l’homme d’affaires comparaît avec cinq autres prévenus pour escroquerie dans l’affaire de l’arbitrage du Crédit lyonnais, il y a 11 ans. « Durant deux heures, le tribunal et le public ont eu le droit à l’affaire du Crédit lyonnais, racontée par Bernard Tapie, poursuit le journaliste. Sur le fond, l’homme d’affaires plaide non-coupable et se dit toujours victime du Crédit lyonnais. Mais sur la forme, l’acteur Bernard Tapie est venu à la barre jouer sur à peu près tous les registres : la sincérité, l’indignation, la colère, l’humour aussi pour tenter de convaincre le tribunal. Il a le visage marqué par les années, par la maladie, mais dès qu’il se met à parler il a toujours cette voix forte qu’on lui connaît, cette gouaille à l’accent de séduction. » Les juges seront-ils sous le charme ?
Il aura d’abord fallu plus de deux heures à la présidente du tribunal pour résumer les faits et les multiples procédures judiciaires liées à ce feuilleton interminable. Flashback. En 1993, mandate une banque publique, le Crédit Lyonnais, pour l’aider à vendre . L’équipementier est cédé pour 315 millions d’euros à un groupe d’acheteurs incluant le Lyonnais, puis revendu plus du double un an après. Tapie assure qu’il s’est fait flouer par la banque et se lance dans une guérilla judiciaire.
Il croit gagner en 2005 lorsque l’organisme public gérant le passif du Lyonnais, est condamné à lui verser 135 millions. Mais la Cour de cassation invalide l’arrêt. Puis, après l’élection de Nicolas Sarkozy, Bercy décide de recourir à un tribunal arbitral privé pour mettre fin au conflit. En 2008, ce dernier lui octroie plus de 400 millions d’euros aux frais du contribuable. Une décision qui va pousser des députés socialistes à porter plainte. Cette sentence ayant été annulée au civil, Bernard Tapie a été condamné à rembourser les sommes perçues, elles aussi contestées. Pour les créanciers, la dette s’élève désormais, avec les intérêts, à près de 525 millions d’euros.
L’avenir des sociétés de M. Tapie, dont dépend ce remboursement, est par ailleurs suspendu à une décision du tribunal de commerce de Paris. Mais l’audience, prévue lundi matin, a été renvoyée en raison de la concomitance avec le procès pénal. L’Etat et le Consortium de réalisation (CDR), l’organisme chargé de gérer le passif de l’ancienne banque publique, tous deux parties civiles au procès, réclament respectivement un million et 500.000 euros au titre du préjudice moral aux mandataires de M. Tapie, ce dernier étant en liquidation judiciaire personnelle « depuis le 14 décembre 1994 », comme l’a relevé l’avocat du CDR, Benoît Chabert.