C’est attablés à la terrasse d’un grand troquet de Bordeaux qu’Édouard Philippe et François Bayrou ont commencé leur dimanche. Le premier, décontracté, de trois quarts, chemise ouverte sous sa veste bleue ; le second, la stature droite devant lui, parle longuement en gesticulant des mains. Qu’ils en ont des choses à se dire. À débattre. « Ils ont discuté de la situation à Bordeaux, évidemment, mais aussi des élections municipales en général. Vous savez très bien que Bayrou est un peu tendu par rapport à tout ça… » glisse un proche du Premier ministre dans les allées du parc des expositions de Bordeaux, où se tient le campus d’été de La République en marche.
« Tendu », c’est le mot. Un euphémisme, même. L’allié historique d’Emmanuel Macron, qui l’a rejoint pendant la campagne présidentielle, est un habitué des bougonnements, des petits coups de sang, jouant à plein son rôle de leadeur du parti d’appoint sans qui LREM deviendrait brinquebalante. Mais rarement le patron du Mouvement démocrate a paru aussi peu en phase avec le chef de l’État et son mouvement.
Il y a de l’orage dans la majorité présidentielle, là où inimitiés personnelles et enjeux politiques se croisent. Bayrou, comme beaucoup dans sa formation, a très peu goûté la décision d’Emmanuel Macron de nommer au poste de commissaire européen Sylvie Goulard (ex-MoDem), avec laquelle il entretient un long passif. « La nomination de Goulard a produit chez François Bayrou une pointe d’agacement, oui », finit par lâcher Marc Fesneau, secrétaire d’État chargé des Relations avec le Parlement. Il en va de même pour l’ex-ministre et fidèle lieutenante bayrouiste Marielle de Sarnez : « Elle était hystérique, elle hurlait dans son bureau, je l’ai rarement vue comme ça », glisse l’un de ses amis…