L’idée avait été évoquée, au détour d’une question lors de la conférence de presse présidentielle post-« gilets jaunes » du 25 avril 2019, sans être suivie de conséquences : « Je pense que pour faire la réforme [de la haute fonction publique] que j’évoquais, il faut supprimer, entre autres, l’ENA », avait alors déclaré Emmanuel Macron. Ce n’était finalement pas une idée en l’air : le chef de l’Etat a annoncé, jeudi 8 avril dans l’après-midi, lors d’une réunion par visioconférence avec quelques centaines de hauts fonctionnaires, la disparition de l’Ecole nationale d’administration. Celle-ci sera remplacée par l’Institut du service public (ISP).
C’est symboliquement très fort, puisque cela consiste à revenir sur l’ordonnance du 9 octobre 1945, qui organisait la haute fonction publique au sortir de la guerre. C’est surtout une réponse politique décalée à la crise des « gilets jaunes », tout autant qu’un message à l’attention des Français à douze mois de la présidentielle : Emmanuel Macron continue de réformer. « C’est un coup politique pour détourner l’attention des malheurs de la France sur les boucs émissaires habituels de notre pays : les hauts fonctionnaires. Pourtant, il n’y a pas de mauvais soldats, il n’y a que de mauvais généraux… », dit dans un soupir l’un d’eux, qui suit toutes ces questions de près.
Devant les 600 cadres de la haute administration réunis en visioconférence pour la convention managériale de l’Etat, M. Macron a déclaré jeudi que le nouvel institut assurerait le socle de formation commun de tous les élèves administrateurs de l’Etat. Qu’ils soient préfets, ambassadeurs, recteurs ou directeurs des administrations et des grands corps.
L’ISP devra « sélectionner des profils moins déterminés socialement », a-t-il dit. Il intégrera un tronc commun à 13 écoles de service public. Ce sera « une révolution profonde en [matière] de recrutement », a estimé le chef de l’Etat. Il faut « réconcilier nos concitoyens avec le sommet de l’Etat et, ce faisant, avec l’action publique », a ajouté le président de la République, très attaché à cette réforme et souvent très critique envers l’administration.