« Déverser du fumier, lancer des œufs ou même emmurer des permanences politiques, c’est insupportable mais ce n’est pas nouveau. En revanche, tenter d’y mettre le feu alors que le député se trouve dans les locaux et que ces locaux se trouvent au rez-de-chaussée d’un immeuble d’habitation, là, la violence change de nature. Et c’est intolérable ! » A Matignon, le message est clair : l’heure est à la condamnation pure et simple des attaques perpétrées depuis la semaine dernière contre La République En Marche (LREM) et les permanences de députés ou de référents du parti macroniste. Au total, dix locaux, de la Haute-Saône, au Jura, de la Creuse au Lot-et-Garonne, des Pyrénées-Orientales à la Gironde ont été violemment ciblés.
L’origine de cette violence est multiple. Dans la nuit de lundi à mardi, un groupe anarchiste a tagué la permanence LREM de Foix de slogans sans appel tels que « Fuck le système », « ACAB » (NDLR : « All cops are bastards » soit « Tous les flics sont des salauds »), « RIC » ou encore « En marche ou crève. » Samedi, des Gilets jaunes avaient tenté d’incendier les locaux du député marcheur de Perpignan. Mais dans la majorité des cas, ces déprédations sont le fait d’agriculteurs en colère contre le Ceta, le traité de libre-échange entre l’Union Européenne et le Canada, ratifié la semaine dernière par l’Assemblée nationale.
Une colère alimentée sur les réseaux sociaux par les Jeunes Agriculteurs ou les fédérations départementales de la FNSEA, les deux plus importants syndicats de la profession. « Il y a un climat de tension qui n’est pas propre au monde agricole mais cette colère qui est incontestable ne doit en rien menacer l’ordre public », martèle-t-on dans l’entourage du Premier ministre qui en appelle aussi à la « responsabilité de tous les partis politiques. » Des consignes de sécurité renforcée viennent d’ailleurs d’être délivrées par le ministre de l’Intérieur. Christophe Castaner a ainsi demandé aux services de police et de gendarmerie des « patrouilles mobiles » destinées à surveiller les permanences et domiciles des députésce week-end.
Du côté des députés LREM, le malaise est d’autant plus grand que certains d’entre eux avaient déjà subi des intimidations, parfois physiques, au plus fort de la crise des Gilets jaunes. Si certains élus s’apprêtent à déposer plainte, d’autres prônent à la fois le dialogue mais surtout la fermeté. « Nous ne laisserons pas se développer la haine sur Internet et dans la société, nous ne tolérerons pas que certains caricaturent l’agriculture, tout comme nous ne laisserons pas d’autres vouloir condamner les associations environnementales. Il ne sera jamais toléré que la violence et la destruction se substituent au dialogue et à la démocratie », viennent d’écrire les vingt députés bretons de la majorité dans une tribune publiée sur le site de France Info. Selon nos informations, quelques élus marcheurs, faisant déjà l’objet de menaces la semaine dernière, auraient même préféré s’abstenir, prudence oblige, lors de la ratification du Ceta au Palais Bourbon , plutôt que de prendre le risque de la voter…