Le haut fonctionnaire Jean Castex, nommé vendredi Premier ministre après avoir préparé le déconfinement, est un ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, à la fois élu local et homme aux réseaux multiples reconnu pour son entregent et son efficacité. Cet homme posé et affable de 55 ans, qui a gardé l’accent de son Gers natal, a commenté vendredi sa nomination en disant « mesurer l’immensité de la tâche » qui l’attend à Matignon.
Il coche un certain nombre de cases qui lui serviront pour porter la dernière phase du quinquennat: énarque, mais au contact des territoires (il est maire de Prades dans les Pyrénées-Orientales); de droite, mais apprécié au-delà de son parti; et parfait connaisseur des arcanes du pouvoir depuis son passage, comme secrétaire général adjoint, à l’Elysée à la fin du mandat de Nicolas Sarkozy.
« Un haut fonctionnaire qui connaît parfaitement le monde de la santé et qui est redoutable d’efficacité », avait résumé son prédécesseur Edouard Philippe en le nommant début avril coordinateur de la stratégie nationale de déconfinement post-coronavirus. « Il travaille à la vitesse de la lumière en gardant un calme à tout épreuve », rapporte un ancien du cabinet ministériel de Xavier Bertrand, qui loue sa « bonhomie », son « empathie » et son « humilité, et assure n’avoir « jamais vu quelqu’un autant faire l’unanimité autour de lui tout le temps ».
Jean Castex, qui n’a jamais été parlementaire ni ministre, a pu s’appuyer dans cette mission sur une vie professionnelle et politique largement orientée vers le secteur social et la santé.
Directeur de l’hospitalisation au ministère des Solidarités en 2005-2006, il devient ensuite directeur de cabinet de Xavier Bertrand à deux reprises, d’abord au ministère de la Santé (2006-2007) puis au Travail (2007-2008). Rue de Grenelle, il a aussi eu à gérer des dossiers délicats, notamment le service minimum dans les transports et la réforme des régimes spéciaux de retraite.
Il laisse à l’époque chez ses interlocuteurs des centrales syndicales le souvenir d’un homme « disponible » et « avenant » même s’il « cache une certaine fermeté », avec « une excellente connaissance de ses dossiers ». En somme, disent les mêmes, « quelqu’un avec qui on peut discuter ». « Politiquement, je suis de droite et je l’assume parfaitement », soulignait alors ce membre de la cour des Comptes.
Peu connu du grand public jusqu’à son poste de « M. Déconfinement », le nouveau Premier ministre a précisé un peu son autoportrait lors de sa première interview sur TF1 vendredi soir, se décrivant comme un « gaulliste social ». Ses valeurs selon lui: « la responsabilité », « la laïcité », et « l’autorité gardienne des libertés fondamentales ».
Nicolas Sarkozy en avait fait en 2010 son conseiller aux affaires sociales, puis le secrétaire général adjoint de l’Élysée entre 2011 et 2012 « Le jour d’après sera de droite comme le jour d’avant » déplorait après sa nomination pour le patron du PS Olivier Faure, tandis que celui de LR Christian Jacob critiquait un virage « technocratique » plus que politique, et avertissait que Jean Castex n’appartenait « de fait » plus aux Républicains avec son entrée au gouvernement.
A deux ans de la présidentielle, sa nomination « présente beaucoup d’avantages pour Macron » et « il se dit qu’il peut ainsi aussi embêter Xavier Bertrand » souligne-t-on dans l’entourage du patron ex-LR des Hauts-de-France, dont le nom revient régulièrement pour représenter la droite en 2022, et qui ne cache pas apprécier « les idées claires et le franc-parler » de cet « énarque rectifié élu local ».
Ce père de quatre filles né le 25 juin 1965 à Vic-Fezensac avait déjà vu son nom circuler fin 2018 pour succéder à Gérard Collomb à l’Intérieur. Il était jusqu’en début d’année délégué interministériel aux Jeux Olympiques de Paris-2024 et présidait l’Agence nationale du sport. Conseiller régional de Languedoc-Roussillon de 2010 à 2015, battu aux législatives de 2012 par la PS Ségolène Neuville, Jean Castex a arraché la petite ville de Prades à la gauche en 2008, avant d’être largement réélu en mars (76%).