Le nouveau ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, visé par une enquête pour viol, a dit jeudi « avoir le droit à la présomption d’innocence » et affirme avoir demandé à ne pas avoir de remontées d’informations sur les affaires le concernant. « Je ne commente pas les affaires de justice en général et pas la mienne depuis 3 ans en particulier. Je constate simplement qu’il y a eu trois décisions de justice, deux enquêtes préliminaires ont été classées sans suite et un non lieu rendu par deux juges d’instruction (…) alors il me semble qu’au bout de trois décisions de justice, on peut penser que j’ai le droit à la présomption d’innocence », a déclaré M. Darmanin sur RTL.
Le ministre, dont la nomination à l’Intérieur a provoqué la colère et l’indignation des associations féministes, a déclaré n’avoir « évidemment » rien à se reprocher et marcher « la tête haute ». Il a affirmé avoir, dès sa prise de fonction, écrit une lettre à son administration « pour n’avoir aucune information ni moi-même, ni mon cabinet, en ce qui me concerne ». « Je suis à la disposition des magistrats », a-t-il souligné. « Je me rendrais à n’importe quelle convocation des magistrats instructeurs », a-t-il complété.
C’est une « situation pas facile à vivre pour ceux qui sont accusés à tort », pour « votre famille, vos amis, votre réputation », a fait valoir M. Darmanin. « Le combat politique fait naître de drôles de choses », a-t-il relevé. Gérald Darmanin a été accusé en 2017 de viol par une femme, Sophie Patterson-Spatz, qui l’avait sollicité en 2009, lorsqu’il était chargé de mission au service des affaires juridiques de l’UMP (parti devenu LR), pour tenter de faire annuler une condamnation de 2004 pour chantage et appels malveillants contre un ex-compagnon. Selon ses déclarations, M. Darmanin lui aurait fait miroiter son appui, et elle se serait sentie contrainte de « passer à la casserole », ainsi qu’elle l’a expliqué aux enquêteurs. M. Darmanin a reconnu avoir eu une relation sexuelle avec cette femme, mais selon lui, librement consentie. Classée sans suite dans un premier temps, la procédure a été relancée par la cour d’appel de Paris qui a demandé début juin de nouvelles investigations.
Des militantes féministes manifestent contre la participation de Darmanin au gouvernement. Certaines ont tenté de perturber sa passation de pouvoir avec Christophe Castaner mardi, d’autres ont manifesté place de la Madeleine. « Quand j’ai découvert la nomination du gouvernement j’ai vraiment eu l’impression de me prendre une énorme claque. Comment on peut imaginer qu’une femme victime de viol va aller porter plainte au commissariat alors qu’elle sait que le patron [de la police] est poursuivi lui-même dans le cadre d’une enquête pour viol ? », interroge Caroline de Haas, militante au sein du collectif #NousToutes, au micro d’Europe 1 mercredi.
Pour Caroline de Haas, cette nomination « n’a aucun sens ». En revanche, le message envoyé par le président de la République lui semble très clair : « Les femmes victimes de viol ne trouveront pas d’interlocuteurs au sein du ministère de l’Intérieur. » L’Élysée avait déjà répondu à ces reproches lundi soir, estimant que les poursuites à l’encontre de Gérald Darmanin n’était « pas un obstacle ». Le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a lui souligné que le nouveau ministre de l’Intérieur peut bénéficier de la présomption d’innocence.
Caroline de Haas s’en prend également au nouveau ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, qu’elle désigne comme un « militant anti-feministe ». « On marche complètement sur la tête. Ça faisait très longtemps que je n’avais pas vu un gouvernement aussi anti-feministe », conclut-elle.